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Tchad: un avocat analyse la procédure et le non-dit de cette affaire de tramodol Gate

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L'affaire des cadres de l'État impliqués dans le trafic de « drogue », a suscité une vague d'indignation et de remous au Tchad. Après des enquêtes judiciaires pleines de rebondissements, plusieurs cadres civiles et militaires ont été arrêtés par l’Agence nationale de sécurité, jugés puis condamnés par la justice lors d’une série de procès très controversés. Sur le verdict, les avis divergent.  Pour certains, cette condamnation des cadres de l’Etat dont le Général Tougoud, un militaire d’un parcours exemplaire, n’a pour seul but que d’envoyer un message positif à la communauté internationale, sur la position du Tchad dans la lutte contre les trafics illicites.


Ce haut gradé serait sacrifié pour blanchir l’image du pays. Dans un entretien exclusif accordé à la télévision panafricaine Africa24 Télévision, le Juriste MBAÏSSAÏN DJEDANEM MAXIME, par ailleurs conseil du Général, revient sur les procédures, les procès et les non-dits de cette affaire de Tramadol Gate. 

Vous avez suivi de bout à bout cette affaire de trafic des stupéfiants impliquant les hauts cadres civils et militaires tchadiens. En tant que juriste et conseil du Général Tougoud, comment appréciez-vous la procédure judiciaire ?

Il est vrai que cette procédure impliquant le général Tougoud, le seul gradé, le seul haut cadre militaire parmi les accusés, n’a pas obéit aux principes fondamentaux de procédure pénale. On leur reproche d'avoir procédé à des trafics de drogue. On le dit abusivement ainsi « drogue », or il est question de trafic de tramadol. Ce sont des produits qui sont pharmaceutiquement admis avec à certaines hauteurs. Ils ont été arrêtés, pour certains en toute violation de leurs droits civiques et le plus simple qui étaient d'être assisté et d'être présumé innocent, jusqu'à ce que le juge se prononce. La procédure est abusée de telle sorte que ces personnes ont été détenues, plus de 5 mois pour certaines et plus de 7 mois pour d'autres dans les locaux de l’Agence Nationale de Sécurité. Elles ont été auditionnées à maintes reprises sans être assistées, en plus dans un service extrajudiciaire. Donc ce sont des arrestations qui n'ont pas obéi à la procédure pénale qui veut que les présumés innocents soient auditionnés régulièrement sur procès-verbal et dans un délai de garde à vue régulier. Au début de cette affaire, des personnes présumées innocentes ont été arrêtées et détenues illégalement plusieurs semaines sans être présentées à la justice, ce qui est une violation flagrante de la procédure et de leurs droits les plus élémentaires. 

Parmi les accusés à la justice, se trouve le Général Tougoud, un haut gradé de l'armée, en service à l’Agence Nationale de Sécurité. Quelle analyse faites-vous de l’accusation portée à l'encontre de cet officier ? 

Je pense que le Général Tougoud qui, est un cadre ayant assez servi le pays, un cadre loyal et respectueux de la hiérarchie militaire, est connu au niveau national pour sa bonne réputation. Curieusement, on l'accuse tantôt d'un faux, tantôt d’être impliqué dans un trafic. Mais il se trouve que le seul lien qui lie le Général à cette affaire est la vente de camions à un acquéreur qui en a fait un mauvais usage. L'attestation de vente établie entre celui qui a acquis le véhicule et le Général, qui est un acte sous seing privé, en quoi cela peut-il être considéré comme un faux ? La preuve qu'il serait impliqué à un trafic des stupéfiants n'est pas démontrée. Aucune preuve matérielle n'a été rapporté contre lui, ni en instance, ni en appel. Malheureusement, nous avons assisté à une condamnation en violation de toutes les règles de droit sans démontrer particulièrement en quoi il a été impliqué ? En quoi on détient les preuves qui l'accablent, les preuves qui établissent vraiment qu'il est sous la coupe d'une quelconque culpabilité ? Aucune preuve n'a été rapportée, car nous n'avions jamais vu les produits de trafic illicite dont on appelle abusivement « drogues », qui seraient incinérés par la suite. Aucune preuve n'a été présentée au tribunal. 

Vous ne cessez de dénoncer la défaillance procédurale de ce procès. Que reprochez-vous de l'instruction de ce dossier en instance et en appel ? 

Pour répondre à cette question, permettez-moi de vous présenter l’un des faits flagrants que nous avons soulevés lors des procès et qui illustre bien le déficit d’enquête et la défaillance procédurale dans cette affaire.  Le chauffeur qui avait été appréhendé dans les locaux où le brigadier de douane a retrouvé le véhicule transportant les produits illicites n’a pas été interrogé par les enquêteurs. On aurait beaucoup eu des éléments concrets et décisifs pour ce procès, s’ils ont interrogé ce chauffeur sur l’identité de son employeur, quel genre de produits son véhicule transportait et qui était son intermédiaire ?  Mais non, on l'a laissé passer sous la poudre d'escampette ce témoin oculaire, aucune audition n'a été faite. Deuxièmement, ce véhicule qui aurait transporté véritablement les produits illicites, a été bel et bien dédouané et des indications précises ont été données aux agents de ce service même si les déclarations faites sont fausses. Etant donné que les documents de dédouanement ont été faits sous la formule communautaire Sydonia, c'est facile de retrouver qui est importateurs de ces produits, qui était le vérificateur de douane à l’entrée de l’équipage, qui a été déclaré comme propriétaire de la marchandise et déterminer enfin la destination finale de l’équipage illicite. Il y avait également des communications vocales, des messages vocaux enregistrés au service de renseignement qui tracent exactement le trajet de la marchandise illicite et qui donnent aussi une indication claire qui permette de déterminer l’identité de la tête pensante de ce trafic. Mais ces éléments n’ont pas été retenus comme preuve. Pour finir, je voulais vous dire que si l'instruction était bien menée, le Général Tougoud serait innocenté. A ce stade, l’officier est victime de seulement de déficit d’instruction de la justice. 

Pourquoi estimez-vous que ces procès sont menés à la hâte pour les intérêts politiques et diplomatiques ? 

Le Général de Brigade, Tougoud est un citoyen tchadien exemplaire, âgé de 53 ans, qui a exercé ses services dans différentes affectations au sein de l’armée de manière loyale. C'est un militaire dévoué à ses chefs hiérarchiques. Je crois qu'il fait partie de cette condamnation parce que les procès sont menés de manière univoque, très rapide de sorte qu'on n'a pas pu faire la différence entre complices, coupables et non coupables. C’est une distribution automatique de peines tendant à satisfaire l'opinion nationale et internationale pour couvrir semble-t-il un réseau qui serait quelque part en train d'importer des produits illicites. A la manière dont les décisions ont été rendues en instance qu'en appel, j'ose croire, qu'en instance du dernier degré que la justice puisse se départir de l'indépendance qu'elle a et dire le droit. Je ne pense pas que le président de la République, président de la magistrature suprême puisse donner des ordres aussi peu commodes, dans un intérêt pas certain à sa population. Nous osons croire que le Maréchal du Tchad aura un œil sur cette affaire afin que les tchadiens qui devraient recouvrer leur liberté puissent la retrouver très rapidement et c'est dans l'intérêt de la cohésion nationale, d'une justice sociale. 

Certains journalistes qui ont fait des investigations sur cette affaire sont menacés par des personnes anonymes au point que certains ont déserté leur rédaction. Que pensez-vous de cette situation et en tant que conseil du Général Tougoud, craignez-vous pour votre sécurité ?

C’est vrai que les investigations des journalistes ont révélé beaucoup des éléments et des réalités ignorées sciemment par la justice et cachés au public. Des révélations qui ont surpris les tchadiens et l’opinion internationale. C’est pourquoi, ceux qui veulent camoufler la vérité devant la justice et devant l’opinion se sont senti vexés et menacent les journalistes pour éviter que ces derniers ne creusent davantage. J’espère que les professionnels de médias ne vont pas se laisser distraire et faire leur travail pour informer les tchadiens de ce qui se trame dans cette affaire et permettre à la justice de fixer les responsabilités en toute indépendance. Comme des millions des tchadiens qui suivent de près cette affaire, nous sommes pour la justice et le droit. Et la justice et le droit finissent toujours par triompher quelque soit le degré des manipulations. Nous avons présenté les éléments et des faits pertinents qui, en réalité, innocentent le Général devant la justice et les investigations indépendantes des journalistes les ont confirmés. Le public tchadien aussi désormais a appris la vérité, il ne reste qu’à la justice de dire le droit. Me concernant, je ne crains rien malgré les menaces parce que moi et mes collaborateurs défendons la vérité et l’état de droit que le Président de la République, le Maréchal du Tchad, promeut au profit de ses concitoyens.  

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