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Face à l’instabilité régionale, le Tchad renforce ses partenariats internationaux

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Après avoir assuré sa stabilité en son sein, le Tchad est à la recherche de nouveaux partenariats internationaux, notamment avec les Emirats arabes unis (EAU), afin de lutter contre les multiples menaces terroristes et militaires qui impactent le Sahel et mettent en péril l’unité nationale recouvrée par le pays.

 

Le 6 mai dernier, Mahamat Idriss Déby Itno, au pouvoir depuis la mort de son père Idriss Déby sur le champ de bataille en 2021, a été élu président du Tchad. La Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale (CEEAC) a salué le bon déroulement de ce scrutin et la solidité des institutions tchadiennes. Mahamat Idriss Déby a pu auréoler sa prise de pouvoir d’une légitimité démocratique, ce qui devrait éloigner les tentatives de renversement par des factions militaires. L’unité du Tchad semble avoir été retrouvée et assurée pour un bon moment. Depuis l’élection, les différentes parties prenantes appellent à la désescalade.

Mais ces réjouissances nationales pourraient être compromises, reléguées au second plan face à des enjeux régionaux et géopolitiques critiques. Frontalier du Soudan, touché par un conflit depuis 2023, où l’Iran joue à plein régime son rôle déstabilisateur, le pays entend assurer sa sécurité et éviter autant que possible les effets de contagion de ce conflit ; situé dans une région, le Sahel, traversé par une vague putschiste sans précédent – depuis 2020, on décompte pas moins de 6 coups d’Etat – qui menace la stabilité de cette bande qui s’étend du Cap-Vert jusqu’à l’Erythrée, le pays est à la recherche de soutiens internationaux pour se parer face à ces perturbations qui pourraient nuire à son unité nationale tout juste retrouvée. Vers qui se tourner ?

L’essoufflement de l’impérialisme français

Le moins probable reste le scénario du statu quo avec une gestion de la crise sécuritaire au Sahel internationalisée sous la gestion de la France et des Nations unies. Un tel système semble avoir atteint ses limites et peine à endiguer la percée des jihadistes dans la région. Le Sahel impute donc à la France son échec dans la lutte contre le terrorisme ; si bien que cet ordre international dominé par la France fait désormais figure de repoussoir. On observe en effet un sentiment anti-français grandissant dans la région, partagé aussi bien par les populations que par les leaders africains – les putschistes n’ayant, par exemple, de cesse de cibler les ingérences étrangères pour justifier leur prise de pouvoir.

Ce sentiment s’est manifesté au Tchad en 2022 avec l’envahissement d’une base militaire française, événement durant lequel les drapeaux français ont été remplacés par des drapeaux nationaux. Ainsi, nombreux sont les Tchadiens qui doutent de la capacité de la France à apporter des réponses sécuritaires au pays qui se trouve dans l’aporie suivante : la population souhaite le départ de la France, sentant que le pays lui en prend plus que ce qu’il ne lui donne, tout en s’inquiétant des conséquences d’un tel retrait des troupes françaises. Si la France a encore 1 000 soldats postés dans sa base à N’Djaména, sa présence autant que son influence semblent prises dans une dynamique de déclin inexorable, le Tchad ayant récemment revu ses accords avec la France et les Etats-Unis.

Vers un renforcement de la piste émiratie ?

Reste le renforcement d’un partenariat régional avec les Emirats arabes unis (EAU). Outre leur proximité, les deux Etats ont en commun une volonté de lutter contre le terrorisme et l’islamisme politique. Aussi bien le Tchad que les EAU sont à l’avant-poste dans la lutte contre la volonté expansionniste au Sahel d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI).

Si les relations diplomatiques entre les deux pays sont de natures anciennes, on a pu observer récemment un approfondissement de leur coopération militaire plus particulièrement depuis 2023 du fait de la conjonction de deux facteurs : le coup d’Etat au Niger et le déclenchement de la guerre civile soudanaise. Cette coopération comprend un double versant. Le premier, sécuritaire, vise à permettre au Tchad de se prémunir d’éventuelles menaces terroristes issues du Niger depuis le coup d’Etat militaire à la fin du mois de juillet 2023. Moins de trois semaines après cet événement, les EAU avaient dépêché des véhicules et équipements militaires pour permettre au Tchad de résister face à des effets de contagion. Elle se traduit également par un versant humanitaire, dans le cadre du conflit soudanais, lui aussi débuté durant l’année 2023. En réaction à ce conflit, les EAU ont mis en place un mécanisme d’accueil des réfugiés soudanais accompagné de la construction d’hôpitaux humanitaires, situés à la frontière du Tchad visant à accueillir les citoyens blessés.

Le partenariat militaire et sécuritaire entre les deux pays s’accompagne d’une coopération économique qui s’illustre dans des accords bilatéraux couvrant un large spectre de domaines de la technologie à la cybersécurité, en passant par le secteur minier. Le Tchad et les EAU ont notamment signé un protocole d’accord en avril dernier pour lancer des projets d’investissement dans les secteurs précédemment mentionnés.

Tout l’intérêt de cette relation réside dans le fait qu’elle lie des impératifs sécuritaires à des impératifs de développement économique. Symbole de la dualité de cette relation, les deux pays, durant la visite de la délégation émiratie en avril 2024, ont rappelé leur engagement en faveur de la stabilité régionale et pour la lutte contre toute forme d’extrémisme.

La reconfiguration des rapports de force, qui se traduit par un affaiblissement de la présence française et du mode de résolution onusien, au Sahel permet donc l’émergence de nouveaux acteurs, tels que les EAU, qui entendent faire valoir une nouvelle voie de résolution de la situation inextricable que connaît le Sahel et assister le Tchad, l’un des derniers bastions de stabilité de la région. Mais parmi ces nouvelles solutions qui s’offrent au pays et au président nouvellement élu, toutes ne sont pas bonnes à prendre. Le recours à une approche internationale remaniée et l’ajout d’acteurs régionaux, tels que les Emirats arabes unis, qui lient leur action sécuritaire au Sahel avec des impératifs de développement économique de la région, se pose comme une voie crédible pour le Tchad.