Tchad : L’impact de la crise sanitaire de COVID 19 sur l’économie
La crise sanitaire liée à la pandémie de COVID 19 impacte gravement sur l’économie mondiale dans le contexte actuel de mondialisation.
La réduction des activités économiques à la suite des mesures de riposte des différents Etats pour endiguer la maladie entraine immédiatement la fermeture d’importantes entreprises (environ 15% à l’échelle mondiale), causant ainsi un chômage massif.
Au niveau de la France, l’activité économique a baissé de 36% d’après l’INSEE et une perte de 3 point de la croissance du PIB annuel projeté pour l’année 2020. Aux USA, le marché de l’emploi se détériore de manière importante. En moyenne, 250 000 américains perdent leur emploi chaque semaine. La Chine pour sa part a perdu environ 13,5% de sa production industrielle entre janvier et février 2020.
Dans les pays développés, les secteurs les plus touchés sont entre autres la culture, le tourisme et les loisirs, à l’instar des autres secteurs.
Le continent Africain, jusqu’aujourd’hui est moins touché, cependant les mesures de prévention prises sur le continent entrainent un effet dévastateur sur le secteur des industries, du commerce, du tourisme et du transport aérien qui sont déjà fragiles. Cette situation abaissera les efforts de réduction de la pauvreté dans un contexte où 1 africain sur 3 vit sous le seuil de la pauvreté. Selon le PNUD, l’Afrique pourra perdre jusqu’à la moitié des emplois et plus de 220 milliards $ de revenus. La Commission Economique pour l’Afrique indique pour sa part que la prévision de la croissance économique pour l’année encours diminuera de 3,2% à 1,8% à cause de la forte dépendance du continent de l’Union Européenne, de la Chine et des USA fortement touchés par le COVID 19.
Le Tchad a enregistré son premier cas le 19 mars 2020 et aujourd’hui compte une centaine de cas et une dizaine de décès. Le nombre de contamination pourra évoluer à cause de la faiblesse du système sanitaire et l’absence du remède.
L’économie du Tchad fortement dépendant de l’informel subit des conséquences importantes en raison des mesures gouvernementales au regard de la fermeture du commerce non alimentaire et la réduction de la production dans le secteur privé et public. La source de revenu du pays repose essentiellement sur l’exportation du pétrole, environ 89% de l’exportation totale du pays. Le choc pétrolier causé par la baisse des cours au niveau mondial (le baril est vendu à 20 dollar US environ) occasionné par le désaccord entre la Russie et l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) impacte sérieusement le budget encours financé à plus de 30% par le revenu du pétrole, budgétisé au prix de 60,5 dollar US/baril.
Les mesures de limitation des rassemblements, de la mobilité des personnes (interdiction de circulation des minibus), la fermeture de certains commerces et la mise en quarantaine de certaines villes du pays produisent un effet très négatif sur la fourniture des services et la production des biens, influençant ainsi le pouvoir d’achat des ménages composé en général de 6 à 7 personnes.
La crise de confiance dans le milieu des affaires ralentie l’investissement étranger direct et encourage la fuite des capitaux. La perte de revenus pourrait conduire à une dette insoutenable pour le pays. L’accroissement des dépenses non budgétisées dans le plan de riposte contre la pandémie aura un effet d’entrainement sur le budget dédié à la lutte contre la pauvreté et les autres maux qui entravent le développement. La projection du taux de la croissance à 5,6% par la Banque Mondiale pour l’année encours ne sera atteinte, l’on pourra s’attendre à une croissance moins importante, voire négative si la situation perdure.
Le plan de riposte proposé par le gouvernement de 943 milliards de Francs CFA ne prend pas en compte l’ensemble des besoins face à la détérioration des conditions sociales.
Pour atténuer les conséquences du COVID 19 sur l’économie, le gouvernement doit restructurer le budget de l’Etat en orientant les dépenses vers les priorités de l’heure telle que le soutien aux ménages, entreprises et au commerce informel et promouvoir surtout les nouvelles technologies de l’information et de la communication afin de permettre au secteur tertiaire de continuer à fonctionner le temps que durera la période de crise.
Kemba Didah Alain
Economiste, expert en politique commerciale et droit international de commerce
Diplômé de Lund University School of Economics and Management